dimanche 15 mars 2009

LES TROIS GRÂCES

RAPHAËL, Les Trois Grâces, 1505, 17 X 17, Chantilly, Musée Condé


Pierre-Paul RUBENS, Les Trois Grâces, v. 1636-1639, 221 X 181, Madrid, Musée du Prado


Les uns veulent faire croire qu'il y en a une pour adresser le bienfait, une autre pour le recevoir, une troisième pour le rendre ; selon d'autres, il y aurait trois sortes de bienfaisance qui consistent respectivement : à obliger ; à rendre ; à recevoir et rendre tout à la fois. (Mais tu peux admettre de ces deux explications celle que tu voudras ; à quoi nous sert ce genre de savoir ?) Pourquoi les mains sont-elles entrelacées en cette ronde qui revient sur elle-même ? Parce que le bienfait forme chaîne et, tout, en passant de main en main, ne laisse pas de revenir à son auteur, et que l'effet d'ensemble est détruit s'il y a quelque part solution de continuité, tandis que la chaîne est fort belle si elle n'est pas interrompue entre-temps et si elle perpétue la succession des rôles. Dans ce groupe toutefois, l'aînée a une situation privilégiée comme, en bienfaits, celui qui commence. Elles ont un air joyeux, comme ordinairement celui qui donne ou celui qui reçoit ; elles sont jeunes parce que le souvenir des bienfaits ne doit pas vieillir ; vierges parce qu'ils sont sans tache, sans mélange, sacrés pour tout le monde. Ils ne sont, à aucun degré, un lien, une gène ; aussi les robes qu'elles portent n'ont-elles pas de ceintures ; et elles sont transparentes parce que les bienfaits ne craignent pas les regards.


SÉNÈQUE, De Beneficiis (Des Bienfaits), Paris, Les Belles Lettres, 1961, 7.
(...) c'est pourquoi on édifiait un autel aux Grâces dans un lieu public, pour rappeler aux gens de retourner les bienfaits ; car c'est une caractéristique particulière de la grâce, sachant qu'on a le devoir non seulement de rendre un bienfait qui vous a été accordé, mais aussi, au-delà, de prendre, soi-même, l'initiative d'un nouveau bienfait.
ARISTOTE, Éthique, V. v.7
L'une d'entre elles est représentée de dos tandis que les deux autres nous font face parce que, pour un bienfait, nous pouvons en espérer le double en retour.
SERVIUS, Vergilii Aeneidem (Sur l'Énéide de Virgile), Paris, Les Belles Lettres, 720.